Lundi 12 mai 2025 à 16h44
Istanbul, 12 mai 2025 (AFP) — Le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) a annoncé lundi sa dissolution et la fin de plus de quatre décennies d'une guérilla qui a fait plus de 40.000 morts.
À quoi faut-il désormais s'attendre ?
Quel avenir pour Öcalan ?
Le chef historique du PKK, Abdullah Öcalan, avait exhorté fin février le groupe armé à déposer les armes. Le leader kurde, emprisonné depuis 1999 sur l'île-prison d'Imrali, au large d'Istanbul, va-t-il être libéré ?
"Sa libération totale paraît improbable", estime Adnan Çelik, maître de conférences à l'École des hautes études en sciences sociales (EHESS) à Paris, qui souligne que le chef du PKK fait l'objet de menaces de mort. En revanche, "il est fort probable que ses conditions de détention soient progressivement assouplies", affirme-t-il à l'AFP.
Un responsable du parti au pouvoir AKP, cité par le quotidien pro gouvernemental Türkiye, a également estimé que le régime carcéral M. Öcalan, âgé de 76 ans, sera "assoupli", sans évoquer de possible libération ni une assignation à résidence, avancée par certains observateurs.
Comment se déroulera le désarmement du PKK ?
Selon des médias turcs, le PKK, dont le commandement est replié depuis des années dans les montagnes du nord de l'Irak, remettra ses armes dans plusieurs zones déjà déterminées de la région.
Le dépôt des armes devrait se faire sous la supervision d'observateurs internationaux de l'ONU, selon un calendrier qui reste à définir, rapportent ces mêmes médias.
"Le dépôt des armes par le PKK est un développement positif, mais le fait que les FARC (Forces armées révolutionnaires de Colombie, NDLR), qui ont déposé les armes en 2016, aient repris la violence moins de cinq ans après, est porteur de leçons importantes pour la Turquie", souligne Imdat Oner, analyste à l'Institut Jack D. Gordon, aux Etats-Unis.
"De tels accords, qui ne disposent pas d'un cadre solide et sont conçus pour servir des intérêts politiques temporaires, peuvent s'effondrer rapidement", affirme-t-il sur X.
Quel avenir pour les combattants du PKK ?
Le gouvernement turc, qui a initié à l'automne le dialogue avec le PKK, n'a pas indiqué si les combattants du PKK feront l'objet d'une amnistie.
Soner Cagaptay, du Washington Institute of Near East Policy, affirme que ses membres "bénéficieront d'une généreuse amnistie", mais que ses cadres ne pourront y prétendre qu'en restant en exil.
Selon des médias turcs, une amnistie générale serait politiquement difficile à assumer pour le gouvernement, qui doit composer avec une opinion publique très largement sceptique quant au dialogue avec le PKK.
D'autant plus que de nombreux opposants, dont le maire d'opposition d'Istanbul Ekrem Imamoglu, resteraient en prison.
Quelles contreparties pour les Kurdes de Turquie ?
"La porte vers une solution politique au problème kurde est désormais grande ouverte", a estimé lundi Aysegül Dogan, porte-parole du parti prokurde DEM, pour qui "tout ce qui était présenté comme des obstacles à la résolution du problème kurde semble avoir été éliminé".
Les observateurs s'attendent à des gestes d'ouverture de la part du gouvernement envers les Kurdes, qui représentent selon certaines estimations un cinquième environ des 85 millions d'habitants du pays.
"Jusqu'à présent, aucun geste symbolique n'a été réalisé. Ni la libération des centaines de détenus politiques souffrant de graves problèmes de santé, ni celle de leaders politiques kurdes tel que Selahattin Demirtas, pas plus que la réintégration des maires kurdes démis de leurs fonctions", souligne cependant Adnan Çelik.
Selon lui, "il serait légitime d'attendre quelques mesures, même symboliques, de la part du gouvernement. Parmi elles, la libération de Demirtas pourrait constituer un geste fort, susceptible d'accélérer la mise en oeuvre de cette décision historique d'autodissolution".
Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.