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Syrie: des centaines de femmes et enfants du camp d'Al-Hol rentrent chez eux


Lundi 3 juin 2019 à 17h42

Camp d'Al-Hol (Syrie), 3 juin 2019 (AFP) — Quelque 800 femmes et enfants syriens ont commencé lundi à quitter le camp de déplacés d'Al-Hol, dans le nord-est syrien, première opération du genre menée par les autorités kurdes confrontées à des défis importants après la victoire contre le groupe Etat islamique (EI).

Les autorités semi-autonomes kurdes ont également annoncé avoir remis cinq orphelins norvégiens à une délégation venue les rapatrier, alors que des milliers d'étrangers affiliés à l'EI sont toujours en prison ou entassés dans des camps dans le nord-est du pays.

Ces deux initiatives illustrent les difficultés auxquelles font face les autorités kurdes, après avoir proclamé en mars leur victoire contre le "califat" autoproclamé de l'EI.

Tout au long de l'assaut contre l'ultime réduit de l'EI dans l'est syrien, c'est à Al-Hol qu'étaient envoyés femmes et enfants de jihadistes étrangers, mais aussi les Syriens et Irakiens évacués. Résultat: en quelques mois, le camp s'est retrouvé saturé.

A maintes reprises, les autorités ont alerté sur la situation du camp d'Al-Hol, où vivent près de 74.000 personnes selon l'ONU.

A la demande de chefs tribaux et de figures locales, l'administration semi-autonome a toutefois finalement accepté de laisser repartir les femmes et enfants syriens.

Lundi, un correspondant de l'AFP a pu voir 17 bus transportant femmes et enfants quitter le camp pour rejoindre leurs familles dans les régions de Raqa et de Tabqa, dans le nord syrien.

Sous de vastes tentes blanches où règne une chaleur étouffante, des femmes portant de gros sacs remplis d'affaires et des enfants en pleurs attendaient leur tour pour être autorisés à monter dans les bus, a constaté le correspondant.

- "Situation catastrophique" -

Certains enfants portent autour du coup une fiche les identifiant, d'autres ont leur nom complet avec un numéro de téléphone écrits sur la main.

Les forces chargées de la sécurité organisaient des files afin d'enregistrer le nom des femmes. Pour permettre leur identification avant de monter dans les véhicules, elles lèvent le voile noir du niqab qui dissimule leur visage.

Mariam Ahmed s'apprête à retourner à Raqa, après quatre mois passés dans le camp. "Je suis heureuse parce que je vais quitter cet endroit pourri, on en a marre de cette situation catastrophique", confie la femme de 27 ans.

Elle avait quitté Baghouz, ultime bastion de l'EI dans l'est syrien, avec son mari, qui est aujourd'hui emprisonné.

"Il est accusé de collaboration avec l'EI. J'espère qu'ils vont aussi autoriser nos maris à partir", souffle-t-elle.

Les départs d'Al-Hol devraient se poursuivre en plusieurs vagues, après l'Aïd, la fête qui marque la fin du mois de jeûne musulman de ramadan, prévue avant la fin de la semaine.

Plus de 30.000 Syriens vivent dans le camp, principalement des femmes et des enfants. A terme, l'objectif est de les faire tous sortir. L'initiative doit aussi concerner des proches de jihadistes.

A plusieurs reprises, les ONG ont dénoncé des conditions extrêmes, notamment une malnutrition aiguë chez les enfants et le manque de soins médicaux.

"La situation dans le camp est très difficile", assène Cheikhmous Ahmed, un responsable. Il dénonce l'inaction "des organisations internationales qui ne prennent pas leurs responsabilités envers les déplacés".

L'administration du camp étudie le rapatriement de familles irakiennes, mais le calendrier n'est pas défini, d'après le Bureau de coordination des affaires humanitaires de l'ONU (Ocha).

- Orphelins norvégiens -

Les camps administrés par les Kurdes accueillent aussi 12.000 étrangers --4.000 femmes et 8.000 enfants de jihadistes parqués sous haute surveillance.

Lundi, cinq enfants orphelins, membres d'une famille liée à l'EI, ont été remis à une délégation du ministère des Affaires étrangères norvégien, a annoncé dans un communiqué Kamal Akef, un porte-parole des autorités kurdes.

L'objectif est de "sortir ces enfants d'un environnement extrémiste pour les transférer vers un milieu saint, où ils seront rééduqués et bénéficieront d'une réinsertion dans leur société d'origine", a-t-il souligné.

Les cinq enfants, âgés d'un à sept ans, sont issus d'une seule et même famille,selon les médias norvégiens. La mère, qui se serait rendue en Syrie en 2015, est portée disparue et le père serait mort. Trois de ces enfants sont nés en Norvège.

Il s'agit de la première initiative du genre impliquant ce pays scandinave. D'après le renseignement norvégien, une quarantaine d'enfants ayant des liens avec la Norvège se trouveraient en Syrie.

La Croix-Rouge norvégienne s'est félicitée de l'annonce mais a appelé au rapatriement de tous les Norvégiens d'Al-Hol.

"Le camp n'est pas un endroit (approprié) pour des enfants orphelins. Le ministère des Affaires étrangères doit maintenant commencer à oeuvrer au rapatriement de tous les Norvégiens ayant lancé un appel à l'aide", a tweeté le secrétaire général de l'organisation, Bernt Apeland.

Les autorités kurdes continuent de réclamer le rapatriement des femmes et des enfants de pays étrangers. Mais les Occidentaux se montrent réticents sur ce dossier. Par le passé, Paris a toutefois rapatrié des orphelins.

burx-dls/tgg/on

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.