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L'actrice iranienne Taraneh Alidoosti libérée à Téhéran


Mercredi 4 janvier 2023 à 20h19

Paris, 4 jan 2023 (AFP) — L'actrice iranienne Taraneh Alidoosti a été libérée sous caution mercredi après trois semaines de détention pour avoir soutenu les manifestations en Iran, selon son avocate.

L'Iran est secoué par des manifestations déclenchées par la mort le 16 septembre de Mahsa Amini, une Kurde iranienne de 22 ans, décédée après son arrestation par la police des moeurs pour infraction au code vestimentaire strict de la République islamique.

Les responsables iraniens dénoncent généralement des "émeutes" et affirment que des centaines de personnes ont été tuées dans ces troubles, y compris des membres des forces de sécurité, et des milliers d'autres arrêtées.

Mme Alidoosti, 38 ans, était détenue dans la prison d'Evine, à Téhéran, depuis le 17 décembre après avoir publié plusieurs messages sur les réseaux sociaux affichant son soutien au mouvement de contestation, dont certains avec des photos sur lesquelles elle ne portait pas de voile et condamnait l'exécution de manifestants.

"Ma cliente a été libérée sous caution aujourd'hui", a annoncé mercredi son avocate Zahra Minooee à l'agence de presse Isna.

Des photos publiées sur Twitter la montre tête nue, sans voile, portant un bouquet de fleurs et discutant au téléphone, à sa sortie de prison, où des amis et collègues l'avaient accueillie. Des figures du cinéma iraniens figuraient parmi eux dont les metteurs en scène Mani Haghighi et Saeed Roustayi.

- "Courageuse" -

D'autres photos la montrent dans une voiture tirant la langue et faisant le V de la victoire avec ses doigts.

L'actrice britannique d'origine iranienne Nazanin Boniadi a salué le fait que sa consoeur était apparue "courageusement sans le voile obligatoire sur les photos après sa libération".

Taraneh Alidoosti était la personnalité la plus célèbre arrêtée en lien avec les manifestations.

Elle est notamment connue pour avoir joué dans des films primés du réalisateur Asghar Farhadi, dont "Le Client", Oscar du meilleur film en langue étrangère en 2017. Elle a aussi joué dans le film de Saeed Roustayi "Leïla et ses frères", présenté cette année au Festival de Cannes.

Celui-ci a salué sa libération dans un tweet accompagné d'une photo d'elle sans voile.

"L'actrice iranienne Taraneh Alidoosti a été libérée après trois semaines de détention: quelle joie et soulagement! Restons impliqués!", a-t-il écrit.

Près de 500 personnalités et autres professionnels du cinéma, comme l'actrice française Marion Cotillard ou le réalisateur espagnol Pedro Almodovar, avaient appelé en décembre dans une lettre ouverte à sa libération immédiate.

Emma Thompson, Golshifteh Farahani, Kristen Stewart, Jeremy Irons et Mark Ruffalo entre autres jugeaient que le moment choisi pour son arrestation, peu avant Noël, visait à "faire en sorte que ses collègues à l'international soient distraits".

"Mais nous ne sommes pas distraits. Nous sommes révoltés", disaient-ils dans la lettre.

"Taraneh a été arrêtée pour avoir condamné sur Instagram l'exécution de Mohsen Shekari, le premier manifestant condamné à mort depuis le début des manifestations à l'échelle nationale qui ont suivi le meurtre brutal par la police de la Kurde iranienne Mahsa Amini en septembre", ajoutaient-ils.

- "Payer n'importe quel prix" -

"Comme tous les citoyens d'Iran, elle a le droit à la liberté d'expression, à la liberté d'association et d'être libre de toute arrestation et détention arbitraires. Nous sommes solidaires et exigeons sa libération immédiate", soulignaient-ils encore.

Depuis son arrestation, le compte Instagram de l'actrice, suivie par plus de 8 millions de personnes, reste inaccessible.

"Votre silence signifie que vous soutenez l'oppression et l'oppresseur", avait-elle déclaré dans son dernier message publié sur les réseaux sociaux, le jour où Mohsen Shekari, 23 ans, était devenu le premier manifestant exécuté par les autorités iraniennes.

Elle avait aussi annoncé ne pas souhaiter quitter l'Iran, se disant prête à "payer n'importe quel prix pour (ses) droits".

Le 9 novembre, elle avait posté une photo d'elle sans voile, avec une pancarte portant le message "Femme, vie, liberté", le principal slogan des manifestations.

Selon l'agence de presse judiciaire Mizan Online, l'actrice avait été arrêtée "sur ordre de l'autorité judiciaire" car elle "n'avait pas fourni les preuves concernant certaines de ses affirmations" concernant les manifestations.

Les informations ci-dessus de l'AFP n'engagent pas la responsabilité de l'Institut kurde de Paris.