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POINT SUR LA SITUATION EN TURQUIE

CILDEKT
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Liste
NO: 163

9/3/2000

  1. LA COUR DE CASSATION TURQUE AUTORISE LES PRÉNOMS KURDES
  2. L’EUROPE DEMANDE UN " PROGRÈS " SUR LA QUESTION KURDE ALORS QU’ANKARA REQUIERT 7 ANS DE PRISON CONTRE LES MAIRES HADEP
  3. PRIX LUDOVIC-TRARIEUX 2000 DÉCERNÉ À ESBER YAGMURDERELI
  4. IMPUNITÉ ET CLÉMENCE POUR LES 20 POLICIERS TURCS INCULPÉS DANS L’AFFAIRE DU QUARTIER GAZI
  5. EUROCOPTER ET BOEING ÉCARTÉS PAR LA TURQUIE DU MARCHÉ D’HELICOPTÈRE DE $ 4,5 MILLIARDS
  6. 10 856 DOSSIERS DE MEURTRES NON ÉLUCIDÉS
  7. LA RECONNAISSANCE DU GÉNOCIDE ARMÉNIEN AJOURNÉE À NOUVEAU PAR LE SÉNAT FRANÇAIS
  8. LA TORTURE DÉNONCÉE : LA COMMISSION PARLEMENTAIRE DES DROITS DE L’HOMME CONFISQUE UN INSTRUMENT DE TORTURE DANS UN COMMISSARIAT
  9. LU DANS LA PRESSE TURQUE


LA COUR DE CASSATION TURQUE AUTORISE LES PRÉNOMS KURDES


Après une longue bataille juridique la chambre civile de la Cour de cassation a décidé pour la première fois dans l’histoire de la République turque d’autoriser l’utilisation de prénoms kurdes. La requête avait été déposée par Nezir Durak qui voulait changer le prénom de sa fille de Hatice, prénom arabo-musulman, imposé par le bureau d’état civil, en Mizgin [ndlr : qui signifie bonne nouvelle en kurde] sur le fondement de l’article 26 du code civil turc en arguant qu’elle était connue par ce prénom dans son milieu familial. La première instance avait débouté M. Durak, mais une décision infirmative était venue le conforter dans sa demande. La juridiction de première degré ayant fait appel du jugement, la chambre civile de la Cour suprême turque a été saisie. Rejeté une première fois, le pourvoi a été accepté sur le fondement de la liberté de choix du prénom. L’arrêt en l’espèce stipule : " (…) les prénoms qui ont été déterminés par les autorités gouvernementales doivent être utilisés. Toutefois, ceci pourrait être vu comme une restriction dans la façon de vivre des individus. Nous rencontrons tous des prénoms signifiant " brave, agile, rare, et prospère " utilisés dans la culture turque. Ce prénom ne peut pas être considéré contradictoire aux traditions, car c’est en accord avec les traditions du plaignant et avec les prénoms utilisés par ses ancêtres (…) Le plaignant a le droit de choisir un style de vie par rapport au mode de vie l’environnant. Si tous les prénoms devaient avoir une origine turque, alors laissez-moi vous rappeler que des prénoms comme Hatice et Mustafa sont d’origine arabe ou perse. Beaucoup d’autres noms ont une origine occidentale. Ce serait une contradiction que de voir des prénoms kurdes ou perses comme un inconvénient au moment où d’autres prénoms occidentaux ne sont pas considérés eux comme contraires à la culture nationale ".

Le quotidien populaire Hürriyet a consacré toute sa Une du 5 mars 2000 à cette " petite révolution culturelle ". Son éditorialiste en chef, Oktay Eksi, par ailleurs, président du Conseil supérieur de la presse turque a, dans un long article, salué le geste des " juges réalistes " et brocardé les hommes politiques incapables de promouvoir les réformes qui s’imposent pour la prise en compte de l’identité kurde.

D’autre part, dans une déclaration le 3 mars, Tansu Çiller, ancienne Premier ministre et chef du parti de la Juste Voie (DYP) a déclaré que " la chaîne de télévision TRT-INT [ndlr : chaîne nationale turque] devrait émettre des programmes pour les pays entourant la Turquie dans les langues parlées dans ces pays. Dans ce même cadre, des programmes émis en langue kurde devraient être pris en considération ". Il s’agit une nouvelle fois de tactique politicienne dont Mme Çiller est tant accoutumée. C’est pendant son mandat qu’il y a eu le plus de répression au Kurdistan turc et que la véritable destruction massive des villages kurdes a été entreprise.

L’EUROPE DEMANDE UN " PROGRÈS " SUR LA QUESTION KURDE ALORS QU’ANKARA REQUIERT 7 ANS DE PRISON CONTRE LES MAIRES HADEP


Le parquet de Diyarbakir a requis le 3 mars sept ans de prison à l’encontre des trois maires kurdes HADEP inculpés pour " soutien au PKK ". Le parquet soutient que Feridun Çelik, maire de Diyarbakir, Selim Özalp, maire de Siirt, et Feyzullah Karaslan, maire de Bingöl, ont profité d’un récent voyage en Allemagne pour rencontrer des membres du PKK, dont un des chefs de la guérilla, Murat Karayilan, qui a demandé l’asile politique aux Pays-Bas. Les trois maires avaient été interpellés le 19 février, inculpés le 24, remis en liberté provisoire et réintégrés dans leurs fonctions le 28. Sept années de prison ont également été demandées pour 11 autres personnes pour les mêmes accusations, alors que huit autres inculpés risquent jusqu’à 15 ans d’emprisonnement pour appartenance au PKK. La date du procès n’a pas encore été fixée.

À Bruxelles, le commissaire européen à l’Elargissement Guenter Verheugen a fait de " progrès " sur la question kurde un préalable à l’adhésion de la Turquie à l’Union européenne, dans une interview au quotidien économique allemand Financial Times Deutschland le 6 mars. " Des progrès dans le règlement de la question sont absolument nécessaires avant l’engagement de négociations d’adhésion (…) Le statut de candidat suppose dès à présent une série d’obligations ", a souligné M. Verheugen.

Ismail Cem, ministre turc des affaires étrangères a déclaré le 3 mars qu’Ankara est " dérangée " par l’importance " spéciale " qu’attachent les responsables européens en visite en Turquie à leurs contacts avec des associations pro-kurdes et de défense des droits de l’homme. Il a également ajouté sur la chaîne turque NTV : " les officiels qui visitent la Turquie peuvent rencontrer toutes les organisations ou associations légales, mais le faire en y attribuant une espèce de signification spéciale nous a, bien sûr, dérangé ". Ces remarques suivent les récentes visites à Ankara des ministres des affaires étrangères de Suède, de Suisse, et du Luxembourg, qui ont rencontré les dirigeants d’associations des droits de l’homme.

Porte-voix des milieux militaires, l’influent journaliste Emin Çölasan, dans un long éditorial publié par le quotidien Hürriyet du 6 mars, évoque carrément " le retour de l’époque des capitulations " et qualifie de " traîtres " et " d’ennemis de la Turquie " les dirigeants des organisations turques des droits de l’homme que les dirigeants européens en visite à Ankara reçoivent si ostensiblement et qui profitent de ces rencontres " pour dénigrer comme des indics " leur pays. Selon lui, sans ces " ennemis de l’intérieur ", la Turquie aurait une meilleure image à l’extérieur.

PRIX LUDOVIC-TRARIEUX 2000 DÉCERNÉ À ESBER YAGMURDERELI


Le jury du Prix International des droits de l’homme Ludovic-Trarieux a attribué le Prix 2000 à l’avocat, écrivain et militant des droits de l’homme turc Esber Yagmurdereli qui purge une peine de prison pour avoir prôné une solution pacifique au problème kurde. Le prix d’une valeur de 30 000F est décerné tous les deux ans conjointement par l’Institut des Droits de l’Homme du Barreau du Bordeaux et par l’Union des Avocats Européens à un avocat, sans condition de nationalité ou d’appartenance à un Barreau, qui aura illustré par sa vie, son œuvre ou ses souffrances, la défense des Droits de l’Homme, des droits de la défense, la suprématie de l’état de droit, la lutte contre les racistes et l’intolérance sous toutes leurs formes. Le premier lauréat avait été en 1985 Nelson Mandela.

Par ailleurs, Christian Charrière-Bournazel, vice-président du CILDEKT, a adressé un courrier daté du 6 mars au Premier ministre turc Bülent Ecevit en lui demandant d’œuvrer pour la libération de E. Yagmurdereli. Tout en demandant l’abrogation de la législation rendant possible l’incrimination, le jugement et l’emprisonnement de défenseurs des droits de l’homme, Me Charrière-Bournazel a ajouté " Je me rappelle moi-même l’époque, en 1981, où j’avais été présent au procès des membres du Comité de la paix parmi lesquels quatre parlementaires de votre parti qui étaient simplement accusés d’avoir tenu des propos et auxquels il n’était demandé compte que de leur opinion au cours d’un procès extraordinaire auquel j’avais assisté comme délégué de la Fédération internationale des droits de l’homme. "

IMPUNITÉ ET CLÉMENCE POUR LES 20 POLICIERS TURCS INCULPÉS DANS L’AFFAIRE DU QUARTIER GAZI


La Cour de sûreté de l’Etat de Trabzon a décidé le 3 mars 2000 la mise en liberté des 20 policiers accusés d’avoir ouvert le feu sur des manifestants en mars 1995 dans le quartier Gazi d’Istanbul. 21 personnes avaient trouvé la mort au cours de quatre jours d’émeutes dans le quartier. Après une très longue procédure et maints renvois, les juges turcs ont acquitté 18 policiers et condamnés deux autres. Adem Albayrak, inculpé pour quatre meurtres, a été condamné à 24 ans de prison pour chaque crime et Mehmet Gündogan a également été condamné pour le meurtre de deux manifestants. Ils ont cependant bénéficié de la clémence des juges turcs qui ont réduit la peine à 6 ans pour A. Albayrak et 3 de prison pour M. Gündogan. La cour ayant par ailleurs tenu compte de la détention, les deux seuls condamnés sont sortis libres du procès.

EUROCOPTER ET BOEING ÉCARTÉS PAR LA TURQUIE DU MARCHÉ D’HELICOPTÈRE DE $ 4,5 MILLIARDS


Le Premier ministre turc Bülent Ecevit a annoncé le 6 mars d’éliminer la firme américaine Boeing et le consortium franco-allemand Eurocopter du très lucratif marché de 145 hélicoptères d’attaque lancé par Ankara d’une valeur de 4,5 milliards de dollars. Restent en lice la société italienne Agusta, l’américaine Bell-Textron et le russe Kamov-A (joint à la société israélienne IAI)

Selon les experts, les hélicoptères sont les armes les plus efficaces contre les combattants dans les montagnes retirées, mais le ministre de la Défense avait déclaré le mois dernier que les appareils étaient également nécessaires pour se protéger de menaces étrangères contre la sécurité nationale. Le Congrès américain a opposé son véto à de précédentes tentatives de la Turquie pour augmenter sa flotte de neuf hélicoptères de combat Bell Super Cobra, arguant qu’ils seraient utilisés pour mener une répression à l’intérieur des frontières du pays.

La Turquie veut coproduire l’hélicoptère choisi dans une usine près d’Ankara, qui fabriquait jusqu’à récemment des avions de combat F-16. Cet aspect du transfert de production est l’un des principaux facteurs pris en compte dans l’octroi du marché. Le marché se déroulera en trois étapes, 45 hélicoptères étant construits dans une première phase, puis 50 dans chacune des deux phases suivantes. La Turquie est également intéressée par l’achat d’un millier de chars d’assaut d’ici 2013, un marché représentant quelque $ 8 milliards. Le ministre de la Défense a déclaré le mois dernier qu’une première tranche de 250 chars, d’une valeur de $ 1,5 milliard sera allouée d’ici la fin de juillet 2000.

Berlin, partenaire d’Eurocopter, ennuyé par le bilan des violations des droits de l’homme en Turquie, avait hésité et tardé à envoyer l’hélicoptère Tigre pour une démonstration à Antalya, Les Verts, partenaires de la coalition gouvernementale allemande, ont à plusieurs reprises annoncé qu’ils quitteraient la coalition en cas de vente d’armes à la Turquie. Or, Eurocopter ne peut vendre ses hélicoptères sans le feu vert à la fois des autorités de Berlin et de Paris. C’est sans doute cette incertitude qui a conduit Ankara à prendre les devants et à écarter la firme franco-allemande de son " marché du siècle ". Quant à Boeing, concourant avec son Apache, il serait trop cher. Cependant l’annonce faite par le Premier ministre Ecevit est vue comme une tactique pour favoriser la compétition entre les trois dernières sociétés. L’Italie récompensée de sa coopération dans l’affaire Öcalan tandis que les alliés traditionnels d’Ankara, les Israéliens (associés aux Russes) et les Américains pourraient avoir leurs parts de marché. Certains avancent également l’idée qu’un rapport existe entre le projet turc de construction de centrales nucléaires ajourné aujourd’hui et celui du marché d’hélicoptères. Le gagnant dans le second n’ayant aucune chance de conquérir le projet nucléaire. D’autres enfin soutiennent que l’annonce avait pour effet de garantir la réélection du président Süleyman Demirel. Selon le calcul, si S. Demirel n’est pas élu pour un second mandat, le gouvernement de B. Ecevit ne pourra pas tenir. Le Premier ministre préfère dans ces conditions que le nouveau gouvernement prenne en charge ce projet ô combien politique.

10 856 DOSSIERS DE MEURTRES NON ÉLUCIDÉS


Le quotidien turc Hürriyet du 6 mars sous le titre " Hizbullah a éclairci 400 meurtres non élucidés, il en reste 10 856 ", soutient que depuis 1990 et les opérations menées contre le Hizbullah, 400 meurtres ont été élucidés à partir des analyses balistiques entreprises sur les armes saisies par la police turque dans 11 régions kurdes. Gökhan Aydiner, gouverneur de la région sous état d’urgence (OHAL) affirme d’ailleurs, qu’au cours d’un mois et demi d’opération, 650 membres du Hizbullah ont été arrêtés et que la lutte est identique à celle menée contre le PKK. Selon lui, il resterait encore 600 combattants armés du PKK dans la région.

Interrogé par le même journal, Me Arif Altunkalem, du barreau de Diyarbakir, rappelle que débuts 2000, on dénombrait 11 256 dossiers de meurtres non élucidés commis dans les provinces de Diyarbakir, Mardin, Batman, Sirnak, Bingöl et Siirt. Il reste donc un long chemin pour faire la vérité sur les crimes.

LA RECONNAISSANCE DU GÉNOCIDE ARMÉNIEN AJOURNÉE À NOUVEAU PAR LE SÉNAT FRANÇAIS


La conférence des présidents du Sénat a pour la seconde fois refusé d’inscrire la reconnaissance du génocide de 1915 qui a fait 1,5 million de morts parmi les Arméniens de l’Empire ottoman. Cette décision semble avoir été prise à la demande personnelle du président Chirac, avocat ardent de la Turquie en Europe. Les partis de gauche, minoritaires au Sénat, ont voté en faveur de l’examen du projet de loi. La Turquie n’a jamais reconnu ce qui devait être le premier génocide du XXe siècle, se contentant d’évoquer des déportations et quelques massacres limités à la faveur de la confusion de la première guerre mondiale. L’Assemblée française avait voté à l’unanimité le 29 mai 1998 le texte de reconnaissance du génocide arménien, mais les pressions exercées par les autorités turques et les négociations sur de juteux contrats d’armes ont une nouvelle fois empêché le vote du texte.

La communauté arménienne a exprimé son indignation et sa colère dans diverses radios et publications qui ont publié le 6 mars une édition commune spéciale de quatre pages éditée à 100 000 exemplaires. Elle appelle à une manifestation nationale le samedi 11 mars à 15 h00 devant le Sénat.

LA TORTURE DÉNONCÉE : LA COMMISSION PARLEMENTAIRE DES DROITS DE L’HOMME CONFISQUE UN INSTRUMENT DE TORTURE DANS UN COMMISSARIAT


Le comité de contrôle de tortures de l’association turque des droits de l’homme à Istanbul (IHD) a publié le 2 mars son rapport pour 1999. Selon l’IHD, 334 personnes ont fait appel à la section d’Istanbul pour dénoncer la torture subie en détention. La plupart se plaignant de " pendaison, bastonnade, chocs électriques, sévices sexuels et viol ". Le comité a indiqué que parmi les 334 victimes, on pouvait compter 27 enfants et 72 femmes et a souligné que 63 personnes avaient un rapport médical attestant les violences éprouvées. Le rapport met l’accent sur le fait que 146 personnes souffrent de préjudices physiques et 104 autres de préjudices moraux du fait des sévices subis.

Les organisations de défense des droits de l’homme en Turquie et à l’étranger ont régulièrement dénoncé la pratique systématique de la torture dans les commissariats turcs. D’ailleurs, ces derniers temps, les responsables politiques n’osaient même plus nier les faits, mais refusaient obstinément d’admettre que les violences étaient systématiques. La commission parlementaire des droits de l’homme, présidé par Mme Sema Piskinsüt, du parti social démocrate (DSP) du Premier ministre B. Ecevit, a ainsi pu saisir au cours d’une de ses inspections dans le petit commissariat de Küçükköy (Istanbul), l’instrument servant pour la " pendaison palestinienne " très affectionnée par les officiers de police turcs lors des interrogatoires. Mme Piskinsüt a déclaré : " nous n’avons pas rencontré d’opposition, mais la clé de la salle d’interrogatoire ne pouvait pas être trouvée ".

Mme Piskinsüt a vivement réagi aux déclarations d’Erol Çakir, gouverneur d’Istanbul, qui a tout bonnement nié les faits en disant " certaines personnes ont trouvé un vieux bâton " et a accusé la commission d’être sous influence étrangère. Quant au ministre de l’Intérieur, Saadettin Tantan, il a indiqué : " je suis totalement contre la torture, mais je dois travailler avec le matériel humain mis à ma disposition ". Seref Turgut de l’IHD a affirmé que " si des perquisitions similaires étaient conduites, des instruments de torture seraient trouvés dans tous les commissariats ".

En 1998, la même commission avait pu mettre la main sur plusieurs instruments de torture, comme des bâtons utilisés pour le falaka et un appareil servant à envoyer des chocs électriques au commissariat de Mugla. Mais jusqu’à ce qu’une instruction puisse démarrer toutes les preuves avaient étrangement disparu. Cette fois-ci, la commission parlementaire a décidé immédiatement de confisquer l’instrument. Bien que la torture soit légalement interdite en Turquie, les condamnations de policiers tortionnaires restent extrêmement rares. Selon le rapport du département d’Etat américain (bulletin n°162), sur 245 affaires au parquet d’Istanbul entre 1996 et 1998, il n’y a eu que 15 condamnations, la plus longue peine étant trois ans de prison.

Par ailleurs, l’association islamiste des droits de l’homme Mazlum-Der, a dénoncé, le 3 mars, l’arrestation de 68 enfants âgés de 6 à 14 ans dans une mosquée à Urfa par la section anti-terreur de la direction générale de la sécurité. Les autorités soutenaient que les cours étaient dispensés illégalement par le Hizbullah. Les enfants, tous âgés de moins de 15 ans, ont dû être libérés par la suite.

LU DANS LA PRESSE TURQUE


M. Ilter Türkmen, ancien ministre turc des affaires étrangères et éditorialiste au quotidien turc Hurriyet affirme que la question kurde a besoin de plus de démocratisation. Voici de larges extraits de son article paru le 7 mars :

" Dans mon article intitulé " L’Etat légal " du 29 février, je disais que la décision du ministre de l’Intérieur, Sadettin Tantan, de retirer rapidement les maires HADEP de leurs postes après leur arrestation, porte atteinte à la présomption d’innocence. Le ministre de l’Intérieur a été aimable de m’envoyer un mémorandum sur l’affaire. Il est dit que le retrait des maires de leurs postes est en conformité avec l’article 127 de la Constitution et l’article 93 de la loi sur les administrations municipales. Nul ne doutait de la soumission de Sadettin Tantan à la loi (…) Les développements relatifs aux maires de Diyarbakir, Bingöl et de Siirt, a mis en lumière nos politiques contradictoires. D’une part, nous voulons empêcher la politisation du problème kurde. En fait, le Premier ministre Bülent Ecevit a mis l’accent sur le danger que comporte un tel développement. Et d’un autre côté, nous facilitons ce processus par nos propres activités. Nous créons l’impression que nous avons cédé à la pression étrangère. Plus encore, nous opprimons un groupe de personnes et créons une situation favorable à la politisation du problème ".

" Les rêves d’indépendance ou l’établissement d’une fédération ou encore la reconnaissance d’un statut autonome pour les Kurdes ont été abandonnés (…) Un autre point doit être pris en considération : Le HADEP est un parti ethnique, sans rapport avec son programme. Certains de ces électeurs sont parmi les gens qui ont soutenu le PKK dans le passé et qui éprouvent encore de la sympathie pour l’organisation (…) En fait, il aurait été utile si des partis modérés comme le Parti de la masse démocratique (DKP) n’avait pas été interdit dans le sud-est de la Turquie. Manifestement, cela aurait empêché un parti d’établir un monopôle sur les voix dans la région.

(…) La politisation peut être réalisée si la Turquie accepte de reconnaître un parti ou une organisation ou encore un groupe qui affirme représenter nos citoyens d’origine kurde en masse (…) Ce que l’Etat doit faire c’est de décider unilatéralement de satisfaire certaines attentes sur une base individuelle. La décision de la Cour suprême d’autoriser les prénoms kurdes par exemple. Incontestablement, la menace appréhendée de la politisation sera évitée si l’Etat adopte les mesures qui sont requises pour une démocratisation opportune. La crainte des responsables des mots et le comportement sans méthode ne nous conduiront nulle part. "